Comprendre Le Québec rural - Bruno Jean, Steve Dionne et Lawrence Desrosiers

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Fiche Ressources DLD N°920-1897

Comprendre Le Québec rural - Bruno Jean, Steve Dionne et Lawrence Desrosiers

Descriptif

De part son format et sa présentation l’ouvrage de mes amis de Rimouski fait penser à ceux que l’on trouve dans la section « Pays et voyages » d’une librairie branchée. De magnifiques photos couleurs (à part celles d’une autre époque), faisant parfois une pleine page, montrent la ruralité québécoise sous son plus beau jour. Non, rien pour rappeler le blocage d’une autoroute par les producteurs de porcs. Les auteurs se sont voulus optimistes en optant pour cette ruralité qui gagne (à être connue). Et, si pour le montrer, en appliquant l’adage voulant qu’une image vaut milles mots, ils ont surenchéri en présentant un grand nombre de graphiques de facture agréable permettant de chiffrer cette ruralité en mouvement pour reprendre le titre d’une section du volume.

La mise en évidence de cette mouvance à la faveur d’un travail d’actualisation des connaissances constitue un des objectifs de l’ouvrage qui ambitionne, tel qu’indiqué par son titre, de faire comprendre notre monde rural en soulignant sa contribution d’une valeur incontestable au développement de la société québécoise. On comprendra qu’ici les auteurs n’ont pas manqué de mettre l’accent sur la diversité, car c’est bien d’une nouvelle ruralité dont est question, l’ancienne n’étant rappelée que sous une forme sociohistorique pour rendre hommage aux pionniers que l’on peut voir représentés par des photos que l’on doit aux premiers « Kodak ».

Étant de ceux qui croient dur comme fer qu’il est possible d’innover n’importe où sur la base de preuves cueillies dans le Québec rural comme ailleurs, je n’ai pu qu’être intéressé tout particulièrement par la sous-section intitulée L’innovation au cœur du rural. J’ai l’habitude de dire que ce qui est possible sur le plan manufacturier dans un village du Lac-Saint-Jean ou du Bas-Saint-Laurent peut l’être en Corrèze ou dans l’Ardèche. Or, les auteurs n’avancent rien de nature à me contredire, bien au contraire. Tel qu’indiqué, le quart des ruraux travaillent dans le secteur manufacturier. Bien sûr, le auteurs se doivent de préciser que ces entreprises manufacturières sont « fondées sur les ressources » et que ce faisant elle ont contribué à donner a plusieurs des régions rurales leur caractère spécifique. Certaines vont même prendre, comme on le sait, une envergure de classe mondiale comme le montrent les exemples de Bombardier et Cascades pour ne nommer que ces deux exemples connus en Europe. Pour sa part, le secteur des services ne fait pas bande à part et s’avère nullement le parent pauvre du monde rural. Les trois mousquetaires de l’UQAR observent que si la population rurale en 2006 correspondait à 26% de la population québécoise, on retrouvait en milieu rural une proportion presqu’équivalente (24%) d’activités reliées au tertiaire. Le recours à divers indicateurs socioéconomiques permet le constat d’une diminution des écarts entre le Québec rural et urbain. Pour les auteurs, c’est là un signe non équivoque d’une transformation profonde de notre ruralité. Mis à part quelque 150 villages menacés de disparition à moyen terme (on utilise ici le terme « dévitalisé »), les milieux ruraux ne sont pas des territoires maqués au fer rouge du sous-emploi et dépendants des transferts sociaux. La mobilité des travailleurs permet de compenser les aléas de la conjoncture internationale qui affectent les secteurs d’activité traditionnels. Mais, pour vivre avec son temps l’innovation devient un impératif. Oui : « Innove ou crève ! » serait-on tenté de dire.

Ici, l’optimisme de nos auteurs s’affiche sans équivoque : « Les ruraux sont une « classe créative » capable de mettre en valeur leur environnement naturel, de gérer leur développement économique et d’aménager leur organisation sociale : la ruralité est ainsi un véritable laboratoire qui participe à la construction de la société québécoise. » L’innovation se rapporte ici à une agriculture renouvelée. Oui, il se fait plus que du lait, du porc et du maïs au Québec. On se trouve en présence d’une production davantage en harmonie avec son territoire et sa population. Ne redécouvre-t-on pas les marchés locaux avec une diversité toujours grandissante de produits du terroir totalement inexistants il y a à peine 20 ans. La forêt ne fait pas exception alors qu’une certaine multifonctionnalité donne lieux à de nouveaux usages. On parle ainsi de la mise valeur de produis forestiers non ligneux. Et comment pourrait-on se permettre d’oublier la culture ? Le foisonnement d’éco-musées et autres centres d’interprétation qui ont surgi depuis les années1990 se veut un démonstration supplémentaire de la vitalité de nos milieux ruraux. L’apport significatif des néo-ruraux à la vie culturelle des milieux ruraux est ici souligné.

Avant de conclure, les auteurs portent leur regard vers l’avenir. À leurs yeux, la nouvelle ruralité telle que décrite résulte de l’émergence de nouvelles campagnes qui, loin d’être des survivances du passé, doivent être vues comme une continuelle construction de la part des ruraux et des urbains qui se joignent à eux. J’écris ces lignes au moment où une délégation chinoise parcourt le Québec rural eu quête de terres à vendre. Oui, des Chinois pourraient en devenir propriétaires comme on le voit à travers l’Afrique afin de nourrir non pas les populations locales mais leur propre population. Les Québécois n’ont rien contre les gens de l’Empire du Milieu, dont ils consomment les produits tous les jours et affectionnent leur cuisine mais, comme le disait un chef innu son fils : La terre ne se vent pas (du moins pas à des étrangers).


Références ou Coordonnées

Bruno Jean, Steve Dionne et Lawrence Desrosiers, Comprendre Le Québec rural, Rimouski, Chaire de recherche du Canada développement rural, 1009, 79 p.


par André Joyal le 7 novembre 2010
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